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ÉRUPTIONS AMOUR ET AUTRES CATACLYSMES de Sigrídur Hagalín Björnsdóttir - Éditions Gaïa

  • Béatrice Arvet
  • 2 mars 2024
  • 2 min de lecture

La passion est-elle compatible avec la raison ? Dans ce roman particulièrement original, Sigrídur Hagalín Björnsdóttir, auteur islandaise, jongle avec la puissance des explosions volcaniques et celle des embrasements humains. Incandescent.

 


La première fois qu’elle l’a vu, elle l’a trouvé sans-gêne, suffisant et très antipathique. Anna Arnardótti, la quarantaine, est une vulcanologue réputée. En concertation avec la protection civile, la police nationale et le service météo, elle veille sur la sécurité d’un pays sans cesse en proie aux convulsions de la croute terrestre provocant régulièrement tremblements de terre et éruptions volcaniques. Tómas Adler, séduisant photographe, est apparu dans son paysage un jour où elle allait inspecter en hélicoptère d’inquiétants signes d’activité au-dessus de la dorsale de Reykjanes. Lors d’une seconde reconnaissance à laquelle il participe également, il la photographie au moment précis où, impressionnée par la vision apocalyptique des éléments en fureur, elle se trouve un court instant en proie à des idées peu scientifiques. Serait-ce le symptôme d’un dérèglement à venir ? Anna, appréciée pour ses analyses rationnelles, dont la méthode est basée sur des argumentations méthodiques, est furieuse d’avoir été surprise dans cette intimité. Si fière de son gentil mari, de ses enfants parfaits, de sa maison accueillante, d’être fidèle à un père admiré, elle ne s’est jamais laissé envahir par des sentiments incontrôlables, générateurs de chaos. Pour elle, la beauté est dans la science, la poésie dans la logique.

Le parallèle entre l’activité volcanique, capable de progresser silencieusement pendant des années, de s’infiltrer dans la moindre faille souterraine, puis de libérer avec rage le magma accumulé, trouve parfaitement sa place avec la déflagration d’une passion amoureuse. Sigrídur Hagalín Björnsdóttir démêle habilement l’héritage parental de son héroïne, cherchant entre le modèle idéalisé d’un père brillant et celui incompris d’une mère ayant rejeté la maternité, comment se met en place le refus de l’émotion au profit de la raison… jusqu’au retournement de situation.

On ne vit pas de la même façon dans un pays menacé par les colères de la terre qu’ailleurs. Loin d’être ennuyeuses, les digressions sur le fonctionnement des volcans instruisent autant sur le « malentendu géologique » caractérisant l’Islande que sur l’ardeur des passions humaines. L’affrontement entre la facette cérébrale et la propension affective d’Anna est rendu avec une intensité impressionnante, en contrepoint aux secousses telluriques qui ravagent sans préavis des zones entières de l’île. Sur la terreur de la perte, la mauvaise conscience, le désir foudroyant jusqu’à l’oubli de soi, on a rarement écrit avec autant de singularité et de finesse.  

 

                                                                                                                      Béatrice Arvet


Article paru dans l'hebdo La Semaine du 8 février 2024

 

REPÈRES

 

Né en 1974, Sigrídur Hagalín Björnsdóttir dirige le service informations de la télévision publique islandaise et présente le JT. Elle a publié 2 romans, « L’Île » (Gaïa, 2018) et « La Lectrice disparue » (Gaïa, 2020).

 
 
 

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